Stéphan Riegel
parfois je devine
ce que tu souris
même si j'avance
pas à pas
comme on traverse la nuit
en la reniant
***
je t'aime
la table autour les oiseaux traversent le ciel
et nos striures
depuis nos plus inavouables nocturnes
et quand tu mets ton rire dans mes mains
au soudain jour le jour dénoue sa corde
au brouillard monochrome
des vues aveuglées je t'aime
au matin frêle
quand le ciel met ses nuages en tas
au petit partage des miettes
entre le café et le thé
et départ cette virgule d'aurore au milieu de ce que ça cogne à la tempe
et l'amour seulement une idée hésitante
tu es au bord de l'évier
impossible à cerner où tu loges exactement l'instant
tu vas à la cafetière
tu lèves au parfum de la tasse doucement et sans transition tu plonges tes yeux à la fenêtre
je peux témoigner ton regard
à la caresse des arbres
au là du là inégalable du présent
ce qu'offrande ce qui juste là
je peux murmurable du vent ce que le vent
dehors dedans mes barques
***
parfois les mots
je t’approche avec
je te repousse avec
je te guirlande avec
je te me déguise avec
mais je ne parle jamais
des débris secs qu’ils peuvent laisser
peut-être pour ne pas avoir peur
de m'y couper
***
si je savais silence
si je savais racine
si je savais lierre et pierre
foudre et source
herbe et départ de l'arbre
petites et grosses bêtes
carte du ciel
la porte et la maison
je pourrais
t'appeler
te regarder
te suivre
éperdument dans la croissance des mains
élargir la bogue d'aimer
***
joie
prune au ventre écrasé
et le parfum juteux
que ça laisse
à rebord des doigts
est-ce qu'on se tiendra
encore en corps
par là
et comme si c'était une neuve fois
une énième première
***
tu ouvres les mains
des couplets de l’une
aux refrains de l’autre
et entre les deux
l'arc
tout l'arc de l'accueil
tu ouvres les mains
je n'entends rien
tu ne tiens
ni le chagrin ni la joie
et les deux à la fois
tu ouvres les mains
du sommet de la nuit
on déchire une plainte
à gorge de l'écuelle du jour
tu ouvres tes mains
comme si dedans les miennes